Il vendait de l’eau, aujourd’hui il vaut des millions. Victor Osimhen, attaquant vedette de Naples et cible prioritaire de Manchester United, incarne à lui seul une leçon de vie et de persévérance. Alors que les Red Devils envisagent de faire de lui leur nouvel avant-centre après l’échec des négociations avec Viktor Gyökeres, le Nigérian de 25 ans est sur le point d’écrire un nouveau chapitre d’une trajectoire hors du commun. Retour sur le parcours bouleversant d’un garçon né dans l’adversité, façonné par la douleur, et propulsé vers les sommets du football mondial.
Un départ tragique : «Il pouvait à peine parler lorsqu’il a perdu sa mère»
Osimhen, qui signifie «Dieu est bon» en dialecte Edo, a vu le jour à Lagos dans une famille modeste. À peine âgé de quelques mois, il perd sa mère. Trois mois plus tard, son père se retrouve au chômage. Dès lors, c’est la survie qui devient la priorité.
«J’ai perdu ma mère en octobre, je ne me souviens même pas de l’année. J’étais petit. Trois mois plus tard, mon père a perdu son emploi. C’était très dur pour notre famille. Mon frère vendait des journaux sportifs, ma sœur des oranges dans la rue et moi de l’eau en bouteille à Lagos au milieu de la circulation. Nous devons survivre, alors restons ensemble. Le soir, nous étions tous ensemble et nous rassemblions l’argent sur la table. Nous avons tout donné à notre grande sœur et elle a préparé à manger et tout organisé. Une partie de ma vie a été une lutte pour survivre. Mais c’est tout ce que je suis aujourd’hui. C’est difficile de tout catégoriser, mais chaque événement a forgé ma personnalité.», confiait-il à France Football.
Le football comme refuge : «Il pleurait si on lui prenait le ballon»
Selon Chinedu Ogbenna, son tout premier entraîneur, la passion de Victor pour le ballon rond était déjà viscérale dans les ruelles de leur quartier.
«J’ai vécu dans le même complexe où Victor est né. Son père était un ami. J’ai été témoin de ses premiers jours sur terre. La maison était un terrain partagé rempli d’enfants. Même tout petit, Victor pleurait sans arrêt si on lui prenait le ballon. Il pouvait à peine tirer, mais il avait juste besoin d’avoir le ballon près de lui. C’est là que sa passion pour le football a commencé. La vie était dure, il a perdu sa mère avant d’avoir un an. C’est le genre de début qu’il a eu, ça en dit long sur son parcours.», a-t-il déclaré.
Malgré la pauvreté, la famille soutient ce rêve naissant, et c’est en 2015 que le monde entier découvre Victor Osimhen. Lors de la Coupe du Monde U-17 au Chili, il inscrit 10 buts, remporte le Soulier d’Or et mène le Nigeria au sacre. Une performance qui change tout.
Les premiers revers : l’échec allemand et la renaissance belge
Recruté par Wolfsburg après son triomphe au Chili, Osimhen peine à s’imposer. Aucun but en 14 apparitions, le Nigérian disparaît presque des radars.
Mais l’histoire ne s’arrête pas là. Charleroi le relance en Belgique. Là-bas, il retrouve la joie de jouer et marque 20 buts en une saison. Une résurrection.
«Je n’ai pas été ébranlé par les critiques à Wolfsburg. J’ai cru en moi. Déménager en Belgique a prouvé que les moments difficiles peuvent être des bénédictions déguisées. De nombreux Nigérians sont venus en Belgique avant moi et ont réussi. Je suis fier d’être parmi eux.», dira-t-il plus tard à The Nationonline.
Explosion à Lille et reconnaissance mondiale
Charleroi le cède à Lille à l’été 2019. Dans le Nord, Osimhen ne met pas longtemps à faire trembler les filets : 18 buts toutes compétitions confondues, dont un contre Chelsea en Ligue des Champions.
«C’est un attaquant avec tout, rapide, fort et techniquement solide. J’avais regardé des vidéos avant le match, mais le voir en direct, c’était différent. Il est impressionnant et son histoire est inspirante», commentera Frank Lampard à l’époque.
Naples, le sommet… et les cicatrices
Recruté pour 70 millions de livres sterling, Osimhen devient en 2020 le joueur africain le plus cher de l’histoire. Après deux saisons d’adaptation, il explose lors de l’exercice 2022/23 avec 26 buts en Serie A, offrant à Naples son premier titre en 33 ans.
Surnommé «l’assassin masqué» à cause du masque qu’il porte après une blessure, il entre dans la légende en battant le record de George Weah comme meilleur buteur africain de Serie A.
Mais l’euphorie est vite entachée : son père décède pendant la pandémie de Covid-19, puis une brouille avec le club napolitain met fin à son rêve de rejoindre Chelsea.
Renaissance en Turquie, résistance à l’Arabie
Mis à l’écart par Naples, Osimhen rejoint Galatasaray en prêt. En Turquie, il brille de nouveau : 26 buts en 30 matchs, un titre de champion et une popularité retrouvée. Courtisé par plusieurs clubs saoudiens, il refuse une offre de 40 millions de livres de salaire annuel.
Son cœur bat toujours pour le football européen, et Manchester United, en quête d’un nouveau leader offensif, pourrait bien être sa prochaine destination.
Une légende en devenir
Victor Osimhen n’a jamais oublié d’où il vient. Longtemps, sa photo de profil WhatsApp arborait la devise : «Focus, work hard and believe». C’est cette philosophie qui l’a conduit du bitume de Lagos aux projecteurs d’Old Trafford, peut-être bientôt.
Il n’a pas simplement gravi les échelons, il les a construits avec sa sueur, ses larmes et son espoir. Et aujourd’hui, alors qu’il est au sommet de son art, il reste avant tout le petit garçon qui pleurait quand on lui prenait son ballon.
Une chose est sûre : peu importe la couleur de son prochain maillot, le nom d’Osimhen restera gravé comme celui d’un battant. D’un survivant. D’un champion.